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Litanie des filles du Néant.
1 juillet 2008

Phaedra 5.

Les chroniques de Phaedra.
D'une infâme mais sublime courtisane.

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"Pour leurrer le monde, ressemble au monde ; ressemble à l'innocente fleur, mais sois le serpent qu'elle cache." Shakespeare.

... Cinquième acte ...

Elle se tenait allongée, nue, sur le divan recouvert d'une épaisse couche d'étoffes satinées et lustrées aux couleurs diaphanes et jaspées. Une perruque stygienne aux parfums capiteux recouvrait son crâne, de lourds bracelets encerclaient ses poignets et ses chevilles nues. Ambiance exotique parfaitement recréée au sein du plus luxueux des bordels de Tarentia-la-Vieille. La petite porte de bois qui fermait la pièce s'ouvrit doucement, laissant entrer une jeune femme blonde légèrement vêtue.

"Il faut que je te parle, Phaedra."

Elle l'observa, silencieuse, quelques instants, de ses larges prunelles ardentes.

"Parle, je t'en prie"

La courtisane contempla sa collègue avant de reprendre la parole. Phaedra venait de se relever, mettant à jour son impudique mais sublime nudité, courbes idéales ciselées, au galbe parfait, incarnation effarante d'une volupté aussi dangereuse qu'irrésistible.

"Ton dernier client, Aloisius, est mort, lui aussi."

Le visage habituellement impassible de Phaedra se troubla, elle semblait nerveuse, inquiète, soucieuse. Elle sembla réfléchir quelques instants, avant de répondre, passant un doigt distrait le long du velours de sa joue.

"De la même manière que les autres, je suppose ?"

Après avoir quitté la Citadelle du cercle noir, Phaedra avait décidé de vivre en Aquilonie, à Tarentia-la-Vieille, où l'activité des courtisanes était intense. Par son physique de stygienne, par sa personnalité intrigante, par sa beauté glaciale, elle parvint rapidement à se faire intégrer dans la plus chère des maisons-closes de la capitale. Les premières années s'étaient déroulées merveilleusement bien, et elle n'avait pas tardé à devenir la plus couteuse des courtisanes de Tarentia. L'enivrant, la mystérieuse, la sulfureuse stygienne. L'érudite, la raffinée, la sublime étrangère... Oui. Tout avait été pour le mieux. Mais, depuis quelques temps, étrangement, ses amants les plus assidus étaient tous morts successivement d'une manière tout à fait singulière : mordus par un serpent venimeux. On retrouvait systématiquement le serpent, mort, à côté du cadavre.
Bien entendu, la belle n'avait pas tardé à faire le rapprochement avec Thot-Amon. Mais le pouvoir de Set ne pouvait s'étendre jusqu'en Aquilonie... Le sorcier avait probablement envoyé l'un de ses hommes... Elle était maudite. Elle avait joué avec le feu et elle s'y brûlait désormais. Non pas que la mort de ces hommes ne l'attriste, mais elle se sentait prise au piège. Elle sentait sa précieuse liberté lui échapper peu à peu, comme une fumée trop éolienne, perdant peu à peu toute consistance jusqu'à devenir éthérée.

"Oui, exactement de la même manière. Certains pensent que tu es responsable de ces morts. D'autant qu'ils ont entendu parlé du meurtre d'Anwar en Stygie."

Phaedra acquiesça d'un geste élégant de la tête. Fuir, toujours fuir...


     "Je vais quitter Tarentia. Je n'ai pas le choix, n'est-ce pas ? N'en parle à personne, je t'en serais reconnaissante et cela sauverait peut-être des vies, dont la tienne."

... Suite à venir ...
(Illustration de Dorian Cleavenger)

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